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Palais fédéral

Les conseillers nationaux veulent abolir l’art. 46 OPP 2

Les commentateurs sérieux sont unanimes : l’échec de la révision de la LPP est également dû à sa complexité. Une chance que le souverain n’ait pas à se prononcer également sur l’art. 46 OPP 2.

11.11.2024
Temps de lecture: 5 min

L’ordonnance sur la prévoyance professionnelle vieillesse, survivants et invalidité (OPP 2) définit dans quelle mesure les institutions collectives et communes peuvent rémunérer les avoirs de libre passage. Cependant, elle ne parle pas d’intérêts, mais d’améliorations des prestations. Celles-ci ne peuvent être accordées que si les réserves de fluctuation de valeur ont été constituées à 75 % au moins.

Cet article de l’ordonnance a été créé pour éviter que les institutions de prévoyance n’obtiennent, par des prestations trop élevées, un avantage concurrentiel qui serait justifié au vu de leur situation financière.

Le 10 octobre 2024, la Commission de haute surveillance CHS PP a indiqué jusqu’à quel niveau une rémunération des avoirs de vieillesse ne devait pas être qualifiée d’amélioration des prestations au sens de l’art. 46 OPP 2.

« N’est pas considérée comme une amélioration des prestations au sens de l’art. 46 OPP 2 toute rémunération de l’avoir de vieillesse des assurés actifs inférieure ou égale à la limite supérieure publiée chaque année par la CHS PP sur son site Internet au cours de la première quinzaine d’octobre », peut-on lire dans le communiqué de six pages.

Deux tiers de la performance moyenne supérieure au taux d’intérêt du marché doivent être disponibles pour alimenter les réserves de fluctuation de valeur. Un tiers peut être utilisé pour la rémunération. Cette formule s’applique aux institutions de prévoyance dont les réserves de fluctuation de valeur sont inférieures à la valeur cible.

Mais qui définit la valeur cible des réserves de fluctuation de valeur ? La CHS précise que cela relève de la responsabilité de l’organe suprême de l’institution de prévoyance, qui fixe le taux d’intérêt technique. Celui-ci doit représenter correctement la situation financière. Il en va de même pour la valeur cible des réserves de fluctuation de valeur.

La question s’impose : n’est-ce pas aussi le rôle de l’organe suprême de fixer un taux d’intérêt qui corresponde à la situation financière de l’institution de prévoyance ?

C’est ce que se sera dit une majorité de la Commission de la sécurité sociale et de la santé publique du Conseil national (CSSS-N). Lors de sa séance du 18 octobre 2024, elle a chargé le Conseil fédéral d’abroger l’art. 46 OPP 2. Cela signifierait que toutes les caisses de pensions seraient autorisées à procéder à des améliorations de prestations, même si leurs réserves de fluctuation de valeur n’ont pas encore été entièrement constituées.

Un pas important vers la dérégulation

Ce changement correspond tout à fait aux idées d’Inter-Pension, l’association d’intérêts des institutions collectives et communes indépendantes. Pour son directeur, Nico Fiore, il s’agit d’un pas important vers la dérégulation de la LPP, qui souffre de surréglementation.

Jörg Odermatt est partenaire fondateur et président du conseil d’administration du prestataire de prévoyance lucernois Pensexpert. Il constate que la CHS influence de plus en plus la partie surobligatoire et limite ainsi la liberté d’action des institutions de prévoyance. Si l’autorité de surveillance modifie constamment les règles du jeu, les plans financiers et d’affaires des institutions de prévoyance seront bouleversés.

Une chance que le souverain n’ait pas à se prononcer également sur l’art. 46 OPP 2.

Si la CSSS-N s’est penchée sur cet article de l’ordonnance, c’est grâce à la motion 24.3372 d’Erich Ettlin. Le conseiller aux Etats du centre du canton d’Obwald n’y demande toutefois pas l’abrogation de l’article. Il plaide plutôt pour que les institutions de prévoyance des corporations de droit public soient exclues de la réglementation.

Lors du débat du Conseil des Etats du 13 juin 2024, Ettlin a déclaré : « Les caisses de pensions de droit public ne sont pas en concurrence avec d’autres caisses de pensions, elles ne pratiquent donc pas d’abus dans ce domaine. »

Selon Ettlin, ce sont les destinataires qui sont touchés par ce désavantage concurrentiel. Ces caisses ne peuvent pas leur accorder « un taux d’intérêt plus élevé, même si elles réalisent une bonne performance et garantissent que les intérêts ne sont pas élevés de manière irresponsable au détriment des assurés existants. » Dans certaines circonstances, le renchérissement ne serait même pas compensé dans ces caisses.

Le Conseil des Etats a approuvé la motion à l’unanimité. Reste à savoir dans quelle mesure le Conseil des Etats soutiendra également l’abrogation totale de l’article si le Conseil national suit cette proposition et décide de supprimer l’article. Erich Ettlin tient avant tout à ce que sa motion soit adoptée, comme il l’explique lorsqu’on le questionne à ce sujet. « Mais je pense », écrit-il, « qu’il ne faut pas trop élargir le cercle, il y a de bonnes raisons de n’exclure que les caisses de pensions de droit public. »

Jörg Odermatt souligne que les institutions de droit public comme Publica ou la BVK sont ouvertes à d’autres entreprises et s’efforcent de diversifier leur portefeuille de clients.

6.8% gravé dans la pierre

Autre sujet : après l’échec de la révision de la LPP, l’Asip, l’association des institutions de prévoyance, demande une pause. Les institutions de prévoyance doivent donc accepter le fait que la LPP ne peut guère être révisée durablement en raison des contraintes de la démocratie de base. Le taux de conversion minimum légal de 6.8 % est provisoirement gravé dans le marbre.

Si l’on veut éliminer les subventions croisées injustes, les institutions de prévoyance peuvent prendre des dispositions dans le domaine réglementaire, c’est-à-dire le surobligatoire. On peut douter que cela soit effectivement le cas, en particulier pour les institutions qui continuent à proposer des prestations surobligatoires insuffisantes.

Cela désavantage les assurés qui optent pour des plans avec des retenues salariales plus élevées et donc des prestations plus importantes. Ils risquent de voir leurs versements ne pas contribuer à l’amélioration de leurs prestations personnelles, mais combler les lacunes de financement des plans minimaux. Ils courent également le risque que leur capital de libre passage surobligatoire ne soit pas aussi bien rémunéré que ne le permettraient les marchés des capitaux – ici aussi au profit des plans minimaux. C’est ainsi que fonctionne le subventionnement croisé.

En dehors de cela, il sera intéressant d’observer dans quelle mesure la gauche va maintenant faire pression pour améliorer unilatéralement les prestations obligatoires dans la LPP, sans pour autant abaisser le taux de conversion de 6.8 %, injustifié sur le plan actuariel. Des interventions en ce sens ont été déposées juste après la votation – l’une d’entre elles avant même le scrutin.